Même si le ciel de la veille ne semblait pas le prédire, Herri Urrats 2006 fut une édition "coups de soleil", en tout cas pour ceux qui n’ont pu ou n’ont pas eu la sagesse de se réfugier à l’ombre. Celle-ci était d’ailleurs particulièrement convoitée dimanche à l’occasion de cette fête des ikastola et de l’euskara, alors que les températures avoisinaient 29°C autour du lac de Saint-Pée-sur-Nivelle. Signe révélateur, pour le début de l’après-midi, les stands vendant les vêtements à l’effigie d’Herri Urrats avaient été dévalisés de leurs stocks de chapeaux.

"C’est sous le signe de l’espoir que nous voulons placer ce 23e Herri Urrats", avait déclaré en fin de matinée Ixabel Charritton, présidente de Seaska, lors de l’acte officiel. "Nous devons tous, chacun dans notre domaine, ¦uvrer pour que cet espoir ne soit pas déçu", avait-elle poursuivi. Après avoir introduit son propos par les mots de John Lennon "Imagine all the people living life in peace" (Imagine tous les peuples, vivant en paix, ndlr), la responsable de la fédération des ikastola a souligné que "la paix durable suppose aussi que tous nous changions le regard que nous portons sur les autres et sur nous-mêmes. Pour ce faire, il nous appartient de passer d’une vision particulière et linéaire de l’Histoire constituée d’une succession de mythes à une vision globale et chaotique où les histoires particulières de France, d’Espagne, du Pays Basque s’entremêlent et se confondent avec l’Histoire de l’Europe et de l’Humanité tout entière". Et de réclamer la reconnaissance légale de l’euskara et "l’action des organismes publics pour que notre langue, notre histoire, notre culture soient transmises à nos enfants".

Des raisons d’espérer

Elle a aussi souligné que "les raisons d’espérer existent" en évoquant la réalisation de pièces de théâtre de Brecht et Labiche en euskara par des troupes francophones "pour des publics pas forcément bascophones". La négociation avec l’Education Nationale d’un "accord reconnaissant les objectifs linguistiques" de Seaska, les négociations ouvertes entre les ikastola de Navarre et le gouvernement foral pour une reconnaissance institutionnelle ou encore l’engagement des Corses dans la voie de l’enseignement pas immersion sont autant de raisons d’espérer selon Seaska.

La cérémonie officielle a également été l’occasion pour Christine Bessonart, maire de St-Pée-sur-Nivelle de souhaiter la bienvenue à ses hôtes et de rappeler que le centre de loisirs de la commune qui abritera la nouvelle ikastola ouvrira ses portes en 2007, "sans aucune subvention publique".

Pour la première fois, Jean-Jacques Lasserre, président UDF du Conseil général a assisté à la cérémonie. Max Brisson, président de l’Office public Euskara, Miren Azkarate, ministre de la culture et porte-parole du gouvernement autonome basque, Josu Jon Imaz, président du Parti Nationaliste Basque, les conseillers régionaux PS François Maitia et Sylviane Allaux, Jean-Michel Galant, conseiller général AB de Baigorri, Michel Berhocoirigoin, président de Laborantza Ganbara, les principaux responsables des partis abertzale AB, Batasuna et PNB, ont entre autres pris part à ce moment officiel.

Pendant ce temps, les dizaines de milliers de participants à la grande fête des ikastola ne manquaient pas d’animations. Plus d’une quinzaine de concerts ont eu lieu sur quatre sites dispersés autour du lac. En plus de Xabaltx, Morau, Otxalde ou No water please, les groupes Ken zazpi et Canta u Populu Corsu sont sans doute ceux qui ont drainé la foule.

De leur côté, les enfants avaient leur lieu propre fait de jeux gonflables géants, équipé d’une estrade où ils se sont produits et animés entre autres par des clowns. Herri Urrats 2006 a également été l’occasion de voir à l’¦uvre les acteurs de la mascarade d’Ordiarp.

Le principal protagoniste de la journée fut toutefois le soleil, et pour en fuir les effets, beaucoup n’ont pas hésité à piquer une tête dans le lac en cours de re-remplissage.

Bientôtdes écoles immersives en corse

Si les Corses étaient venus chanter dimanche à St-Pée-sur-Nivelle, ils étaient également là pour annoncer la création prochaine d’écoles immersives sur l’île de beauté et s’enrichir de l’expérience de Seaska dans ce domaine. "Cette initiative est née d’une réflexion menée avec la diaspora corse qui s’est d’ailleurs fortement investie dans ce projet", a expliqué Cecce Buteau, coordinateur de la démarche et aussi membre de Canta U Populu Corsu. Il a précisé qu’un comité d’éthique est en place pour discuter du contenu du projet, soit la "garantie d’un enseignement ouvert sur l’extérieur et en langue corse".

"Nous sommes déjà presque dépassés par la demande de parents et de communes", a déclaré Cecce Buteau. "Notre principal souci sera de trouver des locaux et de définir le statut des enseignants. Nous discutons d’ailleurs avec le président de l’université de Corse et les responsables de la formation des maîtres", a-t-il dit.