Gara: Latest news - Printed edition  |  Le Journal |  Documents
Google
EUS | ES | FR | ENG
 » PRINTED EDITION
  - Index
  - Sujet à la une
- Basque Country
- Local
- Opinion
- Culture
- Sports
 » DOCUMENTS
 » Hemeroteka
Le JPB > L'opinion > Tribune Libre 2007-10-03
Béatrice PEYRUCQ / Abertzaleen Batasuna
En Pays Basque, le problème du logement et du foncier est totalement lié à la question identitaire (?) Réponse à Xabi Larralde

Petite remarque d’abord concernant les mécanismes de l’offre et de la demande qui entraînent la spéculation. Contrairement à ce que tu écris, l’offre est supérieure à la demande dans bien des territoires. La construction de logements n’a jamais cessé de s’accroître depuis 5 années. Ici même, au Pays Basque, il ne manque pas de biens ni de foncier à vendre! Il manque, par contre, sur le marché de l’immobilier, des biens accessibles aux plus modestes, aux classes moyennes comme il manque des logements adaptés à des familles de 4 ou 5 personnes ou à des jeunes sans charge de famille. C’est donc une offre inadaptée financièrement et socialement à la demande locale que nous devons subir. Les phénomènes de résidences secondaires, de tout tourisme, de produits défiscalisés dans l’immobilier encouragent cette inadaptation.

Concernant la terre "lurra" et la maison, "etxe", je te suis, tout le monde te suit, Xabi, dans le monde entier, même si on n’est pas Basque ou membre d’un peuple autochtone: l’attachement à la terre, originelle ou d’adoption, au paysage, à son environnement, à son territoire, à sa maison, à une maison,Š bien sûr! J’observe qu’au Pays Basque, la solidarité intergénérationnelle qui s’est exprimée dans l’"etxe" s’efface moins vite qu’ailleurs, sûrement parce que des facteurs de cohésion forts persistent (la langue et la culture par exemple).

J’en profite pour souligner qu’au Pays Basque ce qui n’est pas propre à tous les peuples autochtones le glissement de cette solidarité intra-familiale semble se faire au profit d’autres formes d’organisations solidaires particulièrement vivaces, efficaces et généreuses (je ne citerai personne mais je pense au tissu associatif et syndical, coopératif dans son ensemble). Je ne l’attribue pas forcément à une persistance de modèles traditionnels mais plutôt à une tradition de luttes ancienne et fortement implantée dont on retrouve plus de similitudes à mon avis dans les communautés urbaines ouvrières que dans les sociétés traditionnelles. J’ai une secrète admiration pour la faculté d’"inventer de la tradition" des Basques.

Mais revenons au texte, Xabi. Je sais bien pour te connaître et te côtoyer régulièrement qu’il n’y a pas d’ambiguïté dans ton propos. Mais relis bien ta phrase: "les gens du cru", "les jeunes": Qui sont ces "gens du cru"? Qui sont ces "jeunes"? Pourquoi te priver de détailler sur un thème aussi sensible? Pourquoi prêter le flanc ainsi à la critique aisée qui ne manquera pas de tomber? "Il n’y a absolument rien de xénophobe à affirmer cela." Pourquoi utiliser cette tournure en forme de justification non argumentée qui plombe ton propos?

Le texte toujours, Xabi: je ne contesterai pas tes sources historiques et tes références mais un épisode post XVIIIe sur un territoire donné (même s’il est "assez considérable") de l’Histoire ne peut pas, à mon sens, constituer un argumentaire suffisant pour échafauder l’organisation sociale et politique du futur. Même si les "modalités de partage" dont tu fais état comblent les historiens et bercent l’imaginaire collectif(1), l’Histoire doit être relue au regard des préoccupations contemporaines(2).

Ceci étant dit, je te concède qu’il ne faut pas faire fi du passé et que sa relecture croisée avec d’autres approches (économique, sociologique, ethnologique,...) peut être un socle à de nombreuses idées d’organisation et de réorganisation sociale d’autant plus faciles à mettre en place qu’un référentiel commun a préparé les esprits.

La mémoire collective, ça n’est pas rienŠ mais on ne peut faire état, à mon sens, comme tu le fais, en quelques lignes, sur un sujet aussi sensible que celui du foncier et du logement, d’un seul aspect d’une Histoire d’une partie du territoire et le décréter en modèle commun(3).

Tu nous expliques aussi le texte toujours que seule une organisation institutionnelle nouvelle pour le Pays Basque (autonomie, institution spécifique) permettrait d’agir efficacement dans le domaine du logement et du foncier. Selon toi, "(...) fondamentalement, seules de véritables politiques publiques peuvent espérer contrer la toute-puissante loi du marché".

Mais au-delà du fait que je ne vois pas poindre dans les jours prochains une reconnaissance institutionnelle pour Iparralde, je ne vois pas d’organisation autonomique en Europe qui ait permis par sa seule édification "de contrer la toute-puissante loi du marché".

Que tu sois un fervent défenseur d’une reconnaissance institutionnelle, soit! Mais tu ne peux accommoder ce souhait à n’importe quelle sauce. Il existe, par exemple et cela devrait s’appliquer au Pays Basque comme dans tout l’Etat français, tous les outils pour réduire sinon supprimer les inégalités face au logement et au foncier. Et autonomie ou pas, indépendance ou pas, je pense que les Etats et territoires peuvent et doivent réduire les inégalités. Que celles-ci soient particulièrement aiguës dans des territoires comme le Pays Basque où elles accentuent encore et toujours la déculturation et empêchent l’intégration harmonieuse des nouveaux arrivants, je le soutiens depuis des années. Pour autant, plaider une revendication institutionnelle pour laisser à penser qu’elle réglera les problèmes sociaux par sa seule institution, ne m’apparaît guère convaincant.

Imagine un peu le slogan: "Demain, une institution spécifique en Iparralde = un logement adapté aux ressources et aux besoins de chacun!". Qui va croire à cela?

Ce que tu pourrais dire, Xabi, c’est que tu souhaites aux "gens du cru", aux "jeunes" et à toutes celles et tous ceux dont la trajectoire les amène ou les a amenés au Pays Basque, qu’une institution spécifique(4) permette la prise en compte optimum des intérêts linguistiques, culturels, politiques, territoriaux du Pays Basque et de ses habitant-e-s.

Ce que tu peux leur dire Xabi, sans faux semblant, c’est que tu espères et que tu lutteras pour qu’en plus, cette institution soit la plus juste, la plus égalitaire possible pour toutes et tous les habitant-e-s du Pays Basque.

Ce que tu peux dire Xabi, c’est que d’autres modèles sont possibles, y compris comme tu viens de l’écrire à propos de la Kanaky et à mon grand étonnement "au sein de la République française".

Eviter l’écueil du simplisme: "l’institution spécifique réglera tous les problèmes", du passéisme: "Autrefois, c’était tellement mieuxŠ" et de la victimisation: "Comment veux-tu faire si on ne nous donne rien?". Tout un projetŠ

(1) En Béarn, nous avons les fors dont nous vantons le progressisme avant l’heure ; nous avons aussi l’intime conviction que les seigneurs n’ont jamais eu recours au servage et que le protestantisme explique notre aptitude à la gestionŠ

(2) Je n’ai pas, par exemple, entendu ces jours-ci, que le retour au droit d’aînesse rencontre les faveurs.

(3) Il faudrait interroger "les gens du cru" et "les jeunes" pour savoir s’ils souhaitent revenir aux modes d’organisation ruraux post XVIIIe !

(4) Ou l’autonomie, ou l’indépendance, enfin selon ce que tu penses.


 
Print
 
...More news
Sujet à la une
Mundaka, à gauche toute
Pays Basque
La solution passe par un accord politique
Culture
Redonner sa place au théâtre amateur
Pays Basque
Mis en examen "pour complicité de destructions et de dégradations"
Pays Basque
Le responsable aux relations internationales de Batasuna interpellé
Pays Basque
Achat associatif d´immeubles pour faire "du lacatif durable"
  © 2006 Baigura | Contact | About us | Advertise