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Le JPB > L'opinion > Tribune Libre 2005-11-12
Nathalie Valles / Commission Migrations de Batasuna
L`émeute

 

L’émeute c’est d’abord la confrontation émotionnelle de l’émeutier à la logique de l’État. Elle ne dessine pas un paysage politique clair, mais elle produit autant d’intelligence politique que de bêtises. Parce qu’elle devient l’expression collective de dizaines, de centaines, de milliers d’individualités mises à mal par l’Etat. L’émeute n’est ni de droite ni de gauche. L’émeute est souvent l’expression ultime face à un crime social que l’État, une fois de plus, une fois de trop, tente en vain de couvrir parce que ce jour-là, les personnes et la communauté à laquelle ils se rattachent, a décidé de manière vitale pour l’estime d’eux-mêmes que ce crime fondateur était la limite de leur tolérance au mal. L’émeute alors nous échappe car elle n’appartient à personne et à tous, quelle que soit sa couleur politique. Ce que l’émeute tente en vain de faire exploser c’est l’univers carcéral créé par un État centralisé jacobin, C’est l’univers carcéral qu’elle montre plus qu’elle ne le dénonce. Un univers qui n’est pas fait que de malheurs, mais qui est nourri par les limites territoriales qu’impose la crise sociale et économique. L’absence de perspectives, le chômage, le manque d’argent, la surdose médicamenteuse, d’alcool, le racisme. L’émeute est l’automutilation que s’inflige l’émeutier face à l’impunité dont bénéficient tous les acteurs sociaux et politiques. Sarkozy n’en est que le porte-parole. Par le vol démagogique de mots qui ne sont pas les siens, il est venu réaffirmer que tous les espaces territoriaux de l’Etat lui appartiennent. C’est face au mur que naît l’émeutier et produit aussi bien le crime que la révolte. Sarkozy a rappelé le mépris quotidien que prodiguent les dominants, leur impunité dans le crime, le vol, la gestion et leur droit d’utiliser la répression comme réponse aux émeutiers. L’émeute produit de la peur parce qu’elle rappelle qu’en obligeant les gens à survivre et non à vivre elle crée les conditions de sa naissance et de sa mort. L’émeute comme confrontation à l’État centralisé est un constat d’échec pour lui parce que comme réponse émotionnelle, elle répond de manière violente et parfois floue à la répression quotidienne. L’appel à des lois coloniales, pour la contenir pour en reprendre le contrôle dit bien la perception qu’à l’Etat des peuples et sa vision des cités. Comme à la guerre d’Algérie, jamais officiellement nommée, voici la guerre sociale que l’émeute rend visible. Cet ensemble de codes sociaux communautaires liés au racisme et à l’ostracisme social de l’État français, quand la peinture bleue sur les murs, gracieusement offerte par les services sociaux pour repeindre un univers carcéral ne peut plus masquer que le véritable désespoir caché sous le racisme ordinaire, c’est celui de ne pouvoir s’en échapper quoi que l’on fasse. Les territoires de l’émeute sont en premier ceux ou vivent les victimes quels que soient les crimes, les manques de cet Etat. Car entre le donneur d’ordres et celui qui fait le sale boulot, il existe le même mépris qu’entre le donneur d’ordres et l’émeutier. La parole de la répression de l’Etat dans ses salons, la guerre dans les cités, dans les territoires que l’Etat a assignés aux plus pauvres, aux plus précaires. L’émeute dès lors échappe à la régulation sociale parce que cette régulation, elle-même portée par des travailleurs sociaux précarisés, souvent héritiers d’une lutte personnelle pour s’en sortir, si elle sauve des individus, ne règle jamais les problèmes de fond de notre société et de l’Etat français, amenés par une inégalité fondamentale des chances. Les cités cumulant aujourd’hui les inégalités, cumulent les conditions objectives de leurs explosions. Du déficit bancaire à une épargne même pas indexée sur le coût de la vie. De la violence comme régulatrice de la norme sociale à l’impunité des violences de l’Etat : pertes des droits sociaux, inégalités des droits civiques, politiques, culturels, chômage, éducation à plusieurs vitesses, racisme, violences policières, prisons, couvre-feux. Voilà la réponse que propose De Villepin et consorts pour nous imposer et sans nous leurrer avec l’appui de certains, une "démocratie" sécuritaire, une dictature qui ne dit pas son nom. À nous ensemble de réfléchir de manière individuelle, collective à d’autres perspectives, d’autres modèles politiques en résistance à ce qui est une lutte contre la montée des démocraties liberticides qui tentent d’installer de manière durable en créant les conditions de l’émeute, les lois pour exercer leurs pouvoirs totalitaires. L’application de la loi du couvre-feu marque de manière claire une vision coloniale, raciste et militaire de l’Etat français face aux peuples et aux classes sociales qui composent son espace territorial. À nous de revendiquer le droit à tous d’être un véritable sujet politique et de décider ensemble de notre avenir dans la perspective de projets ou l’égalité ne serait plus un principe vendu par les partis politiques français en fonction des opportunités électorales. En 2005 les émeutes sont à Chirac, ce qu’elles furent en 83 et 84 à Mitterrand mais elles portèrent aussi des fruits. Inventons les nôtres, ou au moins essayons.



 
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