L’assemblée générale d’Abertzaleen Batasuna se réunira ce matin à Ustaritz pour évoquer la situation de crise que traverse la coalition Euskal Herria Bai, initialement composée par AB, Batasuna, Eusko Alkartasuna et le Parti National Basque.Une réunion de "reprise de contacts" a eu lieu cette semaine après trois mois de parenthèse, suite au retrait provisoire du PNB au lendemain de l’attentat de ETA à Madrid. Mardi, les représentants du PNB ont fait part de leur retrait définitif, soulignant que Batasuna n’a pas condamné l’ETA.
Le PNB évoquera également cette question aujourd’hui, puisque le président national du parti, Josu-Jon Imaz, sera à Bayonne ce matin lors du débat organisé par la revue Lema à la maison des associations.
Eusko Alkartasuna souhaite la coalition à quatre, mais prenant acte de la décision du PNB, EA préconise la coalition sans le PNB. "AB a la clé" estime EA dans un communiqué, qui souligne sa responsabilité face à des scores faibles si les partis se présentent de façon séparée. EA estime que les législatives doivent marquer le pas des élections municipales et des cantonales de 2008, estimant que le fait de la désunion risque de nuire aux acquis actuels des abertzale en Pays Basque nord.
Appels au maintien
Ces derniers jours plusieurs appels publics ont été émis à destination des quatre partis afin qu’ils maintiennent la coalition Euskal Herria Bai. Le 16 mars dernier une quarantaine de personnes se sont réunies lors de réunions dans les trois circonscriptions, appelées à titre personnel par des abertzale proches des différents partis politiques. Mizel Bergouignan (Baigorri), Mattin Etchepare (Lekorne), Miguel Torre (Mugerre), Iñaki Zaldunbide (Angelu), Serge Harisgain (Senpere), ou Haritza Camblong (Hendaia) faisaient partie des appelants. Devant le risque de voir la situation de blocage se maintenir et de voir le mouvement abertzale partir divisé lors des élections législatives, ces abertzale ont fait part de leur soutien et de leur engagement à la présentation de candidatures unitaires sur les trois circonscriptions du Pays Basque, "condition nécessaire pour défendre nos droits de citoyens basques et défendre nos revendications abertzale". "Nous appelons l’ensemble des personnes et les sensibilités politiques (partis, courants) à se positionner et à travailler en faveur de candidatures unitaires abertzale pour les législatives, sur la base du texte rédigé entre les partis abertzale" ont-ils estimé dans un communiqué à l’issue des réunions.Le groupe des abertzale du canton de Baigorri estime également qu’il est indispensable que les partis abertzale se présentent ensemble lors des prochaines échéances électorales. "Nous avons besoin de rassembler nos forces afin que nos revendications fondamentales soient entendues, que ce soit le barrage à la spéculation foncière, l’officialisation de notre langue, ou la reconnaissance institutionnelle du Pays Basque Nord". "La coalition Euskal Herriari Bai qui avait démarré nous a donné cet espoir. Il est préférable que les 4 formations abertzale se retrouvent mais si l’un des partis décide de ne pas poursuivre cette démarche, la dynamique initiale ne doit pas s’arrêter pour autant" estiment-ils. "C’est pourquoi nous demandons aux partis qui n’ont pas quitté la coalition [ndlr. AB, EA et Batasuna] de poursuivre ensemble dans cette voie afin que le message abertzale ait un poids et garde une crédibilité aux yeux des électeurs" ajoute le groupe baigorriar.
Pour le groupe municipal abertzale d’Ustaritz, depuis de nombreuses années, les groupes municipaux abertzale démontrent qu’il est possible de dépasser les clivages partisans en s’unissant sur ce qui les rassemble. C’est pourquoi face aux prochaines échéances électorales législatives, cantonales et municipales Herria Bizi Dadin appelle tous les abertzale "à prendre leurs responsabilités et à réaliser l’unité".
Echanges
Même si aucune réunion officielle entre les quatre membres de la coalition n’a eu lieu ces dernières semaines jusqu’à mardi dernier, les représentants des quatre partis politiques ont échangé leurs points de vue dans plusieurs supports médiatiques.Dans la revue Zubiak, d’Eusko Alkartasuna en Pays Basque Nord Mertxe Colina (AB) rappelait que l’idée de l’union des abertzale pour les élections est un souhait de plus en plus affiché au sein de la famille abertzale, toutes sensibilités confondues. "Il est temps de panser les maux internes à la famille abertzale" disait-elle. "Afin de peser efficacement dans le panorama politique du Pays Basque nord, il est indispensable d’éviter une dispersion des voix qui nous affaiblit, nous éloigne et nous exclut de toute perspective gestionnaire". L’objectif essentiel et final de tout projet abertzale, selon Mertxe Colina, s’inscrit "dans la construction d’une Euskal Herri euskaldun, réunifiée autour des 7 provinces".
Pour Xabi Larralde, porte-parole de Batasuna, "le moment est venu de visualiser la force du mouvement abertzale en Iparralde, de sorte à aborder en position de force la phase politique nouvelle qui s’ouvrira au sortir du cycle électoral des prochains mois, élections hexagonales et locales". Pour l’élu d’opposition Bayonnais l’enjeu ne se situe pas dans les débats entre partis abertzale, mais vis-à-vis de l’Etat français et au regard d’une nécessité de reconnaissance du Pays Basque par Paris. Au lieu de s’arrêter sur des questions conjoncturelles, Xabi Larralde estime qu’"une réelle volonté permettra de dépasser les obstacles".
Pour sa part, Philippe Duluc du PNB considère que l’attentat du 30 décembre à Madrid "a réduit à néant cette ouverture à Batasuna". "Il est désormais de la responsabilité de Batasuna de clairement se démarquer de la violence politique et de demander un arrêt définitif à l’ETA s’ils veulent intégrer notre offre de coalition" estime-t-il.
Par ailleurs il rappelle qu’une proposition a été faite à Elgar/Ensemble pour s’associer à la démarche, "offre qu’ils ont refusée". "Nous avons aussi envisagé d’intégrer les Verts à notre initiative mais il semble bien qu’ils préfèrent s’unir au PS en négociant à Paris un certain nombre de circonscriptions réservées pour eux".
"Pour que la coalition envisagée soit la plus soudée possible, il est nécessaire que nous sachions dépasser nos différences d’appréciations, même importantes, sans jouer les censeurs et sans oublier qu’en face nos farouches adversaires centralistes français ne sont pas non plus tout blancs, même en morale politique" souligne Manex Pagola d’Eusko Alkartasuna...
Dans l’hebdomadaire en langue basque Argia, Aitor Arandia porte-parole du PNB estimait pour sa part que la population avait reçu "avec enthousiasme" la nouvelle de la création de la coalition EH Bai, notamment chez les abertzale. "Il y a beaucoup de monde prêt à s’engager dans cette dynamique. En revanche, les citoyens ne voient pas d’un bon ¦il que chaque parti aille de son côté. S’ils voient que nous sommes divisés, ils feront un pas en arrière au moment de nous soutenir" disait-il.
Pour le conseiller municipal Bayonnais, depuis le début, l’absence de violence de l’ETA était une condition indispensable. "Nous, on ne s’est pas retiré de la coalition, c’est l’ETA qui a mis Batasuna dehors" estime A. Arandia.
Définitif
La réunion de mardi aura donc été décisive pour le PNB. Pourtant les représentants des quatre partis s’étaient exprimés pour prendre le temps nécessaire, estimant qu’il reste encore de la marge d’ici le mois de juin.Aitor Arandia précisait que le but de la réunion de mardi était de maintenir le fil des relations entre partis abertzale, de ne pas couper le lien. "Nous avons des problèmes pour faire une coalition, mais à court terme. D’autres élections viendront et nous espérons que la situation s’améliorera. Il se peut que dans un mois la situation change" disait-il dans l’hebdomadaire Argia de la semaine dernière.
Mardi, le représentant du PNB a réitéré sa proposition de coalition Iparraldea Bai entre le PNB, EA et AB, après quoi il s’est retiré de la réunion. Abertzaleen Batasuna devra donc décider aujourd’hui, sa préférence pour Iparraldea Bai avec le PNB et EA ou pour Euskal Herria Bai avec Batasuna et EA. Ou encore, l’option de se présenter en solitaire.
