Gara: Latest news - Printed edition  |  Le Journal |  Documents
 
EUS | ES | FR | ENG
 » PRINTED EDITION
  - Index
  - Sujet à la une
- Basque Country
- Local
- Opinion
- Culture
- Sports
 » DOCUMENTS
 » Hemeroteka
Le JPB > L'opinion > Tribune Libre 2006-10-11
Christophe Piedra / CIMADE - Centre de rétention administrative Hendaye
A quel prix?

Dire que l’une des volontés premières du ministre de l’Intérieur est d’augmenter le nombre de reconduites à la frontière d’étrangers en situation irrégulière (25.000 pour l’année 2006) n’est pas une nouveauté. Ce qui est nouveau en revanche c’est la publication du coût financier de cette obsession ministérielle. En effet, tout récemment, un quotidien économique national a réussi à se procurer quelques chiffres éloquents, sur les moyens financiers disproportionnés octroyés à ce ministère pour lui permettre d’atteindre le nombre d’éloignements voulus.

Ainsi le budget 2007 de la Police nationale, qui englobe la lutte contre l’immigration irrégulière enregistre la plus forte progression : hors rémunération des agents de police, il atteint 179,1 millions d’euros, soit une hausse de plus de 60 % par rapport à 2006 (106,8 millions d’euros). Cette somme comprend les frais d’expulsion, mais aussi l’ensemble des moyens qui permettent de lutter contre l’immigration clandestine (contrôle des frontières, lutte contre les réseaux) ainsi que le fonctionnement et l’extension des centres de rétention administrative, où sont enfermés les sans-papiers avant leur départ. Sur ce point est mis en place un programme d’agrandissement et de construction de centres de rétention (Nîmes, Hendaye et Orly en 2007). Ceux-ci affichent aujourd’hui un taux d’occupation si élevé qu’il n’est pas rare que des étrangers ne puissent être reconduits aux frontières faute de places. Le ministre prévoit ainsi de faire passer le nombre de lits de 1.447 à 2.500 en juin 2007 (+ 48,5 millions d’euros).

En tenant compte de la masse salariale, on obtient un total de crédits de paiement de 687,7 millions d’euros pour 2007, contre 534,6 millions pour 2006: 10.894 emplois en équivalent temps pleins sont budgétés pour l’an prochain contre 9.083 pour cette année. Dans sa folle course au chiffre, Nicolas Sarkozy veut atteindre 28.000 éloignements (France métropolitaine) en 2007, alors même que ses objectifs fixés pour 2005 n’ont pas été atteints.

Pour mesurer l’efficacité des services de police, le gouvernement s’était engagé à publier différents indicateurs. Mais le plus instructif d’entre eux, le taux de remise en liberté pour vice de procédure imputable aux fonctionnaires, n’est "pas encore prêt". L’indicateur sur le coût moyen en centre de rétention a vu, lui, le jour : il devrait avoisiner 1.000 euros par étranger en 2007 pour une durée moyenne de rétention de 10 jours, contre 875 euros en 2006 (10 jours), 802 euros en 2005 (9,4 jours) et 606 euros en 2004 (7,8 jours).

Avec la multiplication des charters en particulier vers la Roumanie dont la fréquence est d’environ un toutes les deux semaines, le ministère compte sur le principe de "l’économie d’échelle" ("charters communautaires" avec d’autres pays européens) pour abaisser le coût moyen des éloignements aujourd’hui très élevé. Quelle efficacité, on se le demande, pour ce genre d’opération purement médiatique alors que la plupart des Roumains expulsés reviendront quelques jours après. Il y a déjà en effet très longtemps que les Roumains ont renoncé à attendre le 1er janvier 2007 pour se proclamer citoyens européens et revendiquer à juste titre le droit à la liberté de circulation qui s’y rattache.

Ces sommes colossales sont gaspillées dans un double espoir politique bien vain. Le premier consiste à envoyer vers les pays tiers un message de fermeté pour tenter de dissuader les étrangers candidats à l’immigration clandestine de partir de chez eux. Le second vise à sécuriser une certaine frange de l’opinion par la démonstration d’actions menées pour maîtriser l’immigration clandestine.

Mais si ces messages politiques ont un coût financier considérable, le coût humain reste bien supérieur.

Présente dans les centres de rétention, la CIMADE mesure au quotidien l’humiliation supportée par les personnes retenues puis expulsées pour permettre à l’administration d’atteindre ces objectifs absurdes.

Ainsi il n’est pas rare en particulier à Hendaye, de voir des personnes placées en rétention après avoir été interpellées à la frontière dans le bus retour (Paris Casablanca par exemple) sur la base d’un visa périmé depuis quelques jours ! Cette personne connaîtra alors l’enfermement, les menottes, une présentation devant un juge pour se voir finalement reconduire vers son pays d’origine au frais de l’Etat, vers un port ou un aéroport à plusieurs centaines de kilomètres de chez elle. Loin d’être anecdotiques les exemples ubuesques de ce type de reconduites à la frontière se multiplient sur l’ensemble du territoire français. Mais peu importe la casse humaine et l’argent public dilapidé, reste l’objectif politique à atteindre à n’importe quel prix.

Un dernier chiffre : 6924 personnes régularisées cet été alors que plus de 30.000 dossiers de demandes de régularisation avaient été déposés par les familles dont au moins l’un des enfants est scolarisé. Reste donc environ 25.000 personnes déboutées... 25.000 c’est exactement le nombre de reconduites à la frontière voulues pour cette année. Décidément, excepté pour son budget, au ministère de l’Intérieur les chiffres se suivent... et se ressemblent.


 
Print
 
...More news
Sujet à la une
Familles au scalpel de jeunes réalisateurs
Pays Basque
Robert Villenave : "Gimenez m’a trahi"
Pays Basque
Force Ouvrière tire la sonnette d’alarme sur l’avenir de la Sagem
Pays Basque
L´Exp´eau prête à naviguer de ville en ville
Culture
Humain dans une dramaturgie high-tech
Culture
Livre en fête au Pays Basque et dans le monde
Sports
Du rugby au campus et vice versa
Pays Basque
Élus PS, UMP, UDF abertzale et Verts pour le processus de paix
  © 2006 Baigura | Contact | About us | Advertise