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Le JPB > Sujet à la une 2006-05-24
La marque 64 fait condamner les Bretons du 29 pour contrefaçon
La société Bil Toki qui exploite la marque de vêtements 64 a fait condamner hier par la justice une PME bretonne pour avoir utilisé le numéro du département 29 sur ses T-shirts

A qui appartiennent les numéros de départements français? La question peut paraître incongrue. Elle est tout à fait sérieuse en matière de commerce. Et le tribunal de Toulouse a donné sa réponse hier. Nul autre que 64 n’est autorisé à exploiter commercialement des numéros de départements.

A sa création, la société Bil Toki qui a créé la ligne de vêtements 64 a déposé auprès de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) un certain nombre de marques: tout un ensemble de numéros de départements, le 64 bien sûr, mais aussi le 31, 59, 29, 33,... Un numéro administratif au départ qui devient donc une marque déposée.

Ce dont se sont rendu compte à leurs dépens deux jeunes Bretons. Avec leur PME Julou Compagnie, basée à Brest, ils lancent en 2004 une série de tee-shirts, signés Momo le homard jouant sur l’identité locale et l’humour, dont certains sont frappés du sigle 29, numéro de leur département finistérien. La société Bil Toki les assigne devant le tribunal de Toulouse pour contrefaçon. L’affaire a été examinée le 11 avril dernier.

Le choix de la capitale de Haute-Garonne n’est pas dû au hasard. Dans la mesure où les vêtements de Momo le homard sont vendus sur internet, le poursuivant a le choix du tribunal. Celui de Toulouse a déjà donné raison à la société de Guéthary qui avait poursuivi en 2005 des sociétés exploitant la marque 31 et 59. Jugement condamnant ceux qui exploitaient des textiles, confirmé en appel ce mois-ci contre 59.

"Utilisation frauduleuse"

Denis Wargnier, PDG de Bil Toki explique qu’"il s’agit de l’utilisation frauduleuse d’une marque déposée et exploitée par nous". Son avocat Me Iglesis précise que "ce n’est pas un nom de département (Finistère ou Bretagne) qui est déposé mais un numéro", avant d’ajouter que Chanel avec le numéro 5 ou Blanco avec le numéro 15 sont tout aussi sourcilleux que Bil Toki. Le conseil de Bil Toki indique également que la société Momo le homard a voulu elle aussi déposer la marque 29 à l’INPI, et qu’ils se sont ainsi rendu compte que le nom était déjà pris.

"On l’a fait parce que c’est l’INPI qui nous avait conseillé de le faire" se défend Erwan Guiziou. Le dirigeant de la société brestoise contredit également l’avocat de Bil Toki en signalant que le graphisme du 29 n’a absolument rien à voir avec celui de 64. Pour les créateurs de tee-shirts Momo le homard "la société Bil Toki souhaite créer une situation de monopole d’utilisation des identités départementales sur des articles textiles". L’analyse va plus loin en estimant que pour "ne pas être accusée de ne pas utiliser des marques qu’elle a déposées, la société Bil Toki propose à la vente des tee-shirts de tous les départements dont ils estiment avoir l’usage exclusif. La stratégie de 64 est claire, créer un monopole, et probablement éviter de vendre les tee-shirts Œles numéros’ afin de ne pas banaliser leur propre marque 64". Il est vrai qu’il est par exemple difficile de voir des tee-shirts avec d’autres numéros exploités par Bil Toki tant sur leur site internet que dans leurs magasins.

L’affaire a fait grand bruit en Bretagne. Malgré la sympathie a priori qu’il peut y avoir à l’égard des Basques, nombreux sont ceux qui trouvent fort de café qu’on vienne les empêcher d’utiliser "leurs" numéros. Le député UMP de Carhaix, Christian Ménard, s’est notamment fendu d’une question écrite le 9 mai dernier au ministre des PME et du Commerce Renaud Dutreil (à ce jour sans réponse) afin de savoir "s’il est légalement possible" de "déposer tous les autres chiffres [que 64] correspondant à des départements, interdisant de fait leur utilisation par d’autres entreprises dans un but commercial". Dans la presse bretonne (Ouest-France du 6 mai) on s’émeut de savoir si le conseil général du Finistère ou un club sportif pourrait se faire sanctionner en utilisant ce numéro pour ses opérations de communication. Des forums de discussion sur internet critiquent peu aimablement la marque 64.

Hier le tribunal de Toulouse a tranché en faveur de Bil Toki, condamnant les Bretons à 10000¤ de dommages et intérêts (il en était réclamé 30000¤) et à voir leurs stocks saisis. En outre, ils sont condamnés à 1000¤ par jour d’astreinte et à 1000¤ par infraction constatée". Erwan Guiziou dit ne pas être surpris par ce jugement: "un juge toulousain n’allait pas déjuger un collègue toulousain". La PME de Brest qui emploie quatre salariés et qui vient d’ouvrir une seconde boutique à Quimper, compte bien faire appel. Même si l’appel n’est pas suspensif.

Les numéros d’immatriculation et de départements datent d’avril 1950. Ils sont promis à disparaître début 2008 lors de la généralisation du nouveau Système d’Immatriculation des Véhicules (une immatriculation Œà vie’). Cependant, facultativement, chacun pourra garder un signe distinctif, de type numéro de département. La querelle est donc loin d’être terminée, surtout si les enjeux commerciaux perdurent.



Une marque de département très pays basque
I.E.

Témoin du succès de la marque, une nouvelle boutique 64 a ouvert ses portes en mai, à Madrid. C’est la seizième ‹quatre au Pays Basque, mais aussi Paris, Bordeaux, Lyon, Toulouse,... La marque de vêtements 64 a été créée en 1997 par Denis Wargnier et Olivier Mauroux. Dirigée par le premier, la société Bil Toki qui exploite le numéro du département des Pyrénées-Atlantiques enregistre un chiffre d’affaire de l’ordre de 7M€ en 2003, et 5M€ en 2005.

Denis Wargrin originaire de Guéthary où il a établi la maison mère est un professionnel du textile. Il a auparavant bourlingué 15 ans chez Cacharel et six ans chez Rodier.

Le succès de la ligne de vêtements et produits dérivés 64 (comme pour d’autres marques "locales" comme Paseo, Kukuxumusu, Biper Gorri,...) est concomitant du mouvement social qui a réclamé la création d’un département Pays Basque ‹qui culmine en octobre 1999 avec plus de 10 000 manifestants à Bayonne.

Contradiction ? Pas si l’on se réfère aux analyses du sociologue Francis Jauréguiberry sur "l’importance de faire local" dans les signes identitaires affichés (voir JPB du 18/19 mars). De même, les promoteurs de la marque avancent que "64, c’est la marque au logo évocateur des vacances et du Pays Basque [qui] symbolise l’art de vivre sur la Côte Basque : la nature, le sport, la fête, le bien-être". La société poursuit ainsi l’évocation censée susciter par la marque 64 : "notre région est unique, entre océan et montagne, à la croisée de tous les sports : pelote basque, surf, golf, rugby". Thèmes que l’on retrouve décliné dans les dessins des tee-shirts et auquel on peut ajouter la tauromachie.

80% des clients hors 64

Sophie Mengue et Franck Lalanne, dans leur Master marketing (CEEM) de l’Université de Pau réalisé en 2004 consacré à la société Bil Toki, confirment que la marque 64 vend davantage l’image du Pays Basque que celle du département des Pyrénées-Atlantiques. Ils ajoutent que "le c¦ur de la cible de la marque 64 est les post-ados (ou jeunes adultes) : entre 15 et 35 ans, [et que] contrairement à ce que l’on pourrait croire 80% des clients de 64 ne sont pas du département.

Bref le signe 64 est identifié au Pays Basque, ou à l’idée que l’on peut s’en faire. En guise de contribution au débat de jeudi en Soule dans le cadre de Müsikaren egüna à Ordiarp, ou à la réflexion entamée par Hemen ‹synthétisée par Gisèle Lougarot‹ afin de savoir ce qu’est "un produit Pays Basque", "la marque Pays Basque". Et d’indice paradoxal pour les partisans de la création d’un département Pays Basque.


 
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